Image générée par intelligence artificielle. Le marché américain des vins et spiritueux reprend doucement des couleurs après une année noire.

La quasi-totalité des pays fournisseurs semblent touchés par d’importantes pertes en volume. L’Italie et la France sont particulièrement impactées par la situation morose du marché américain (-13% et -16%), mais dans une moindre mesure que les gros fournisseurs de vin en vrac comme le Chili ou encore l’Afrique du Sud qui perdent parfois plus de la moitié de leurs volumes par rapport à 2022.

6 milliards d’euros ont été importés par les États-Unis l’année dernière. Si ce chiffre peut paraître important, le chiffre d’affaire baisse de plus de 800 millions d’euros par rapport à 2022. Bien que le prix par bouteille exporté vers les États-Unis continue globalement à progresser pour l’essentiel des fournisseurs, les chiffres d’affaire ne résistent pas à l’érosion des volumes.

Consommation de vin en 2023 : un chiffre d'affaires en baisse, mais un segment premium qui résiste

Le consommateur américain est de plus en plus sobre. D’après l’OIV, les volumes consommés aux États-Unis se replient de 3% par rapport à 2023, alors que les estimations d’organismes spécialisés notent un repli continu des volumes depuis 2021.

Ce constat s’étend aussi au budget des consommateurs sur une année et impacte le chiffre d’affaire de la filière vin. Si les vins Premium (>12$) se comportent globalement bien, avec même une légère croissance de leur chiffre d’affaire, les vins « Value » se retrouvent dans une situation délicate. Perturbés par des volumes à la production très importants et une appétence de plus en plus prononcée du consommateur pour des vins plus haut de gamme, les stocks chez les grossistes et détaillants ainsi que chez les producteurs ont eu du mal à s’écouler en 2023.

Les raisons de la stagnation du marché américain du vin sont nombreuses. Si certains comme l’inflation élevée semblent plutôt conjoncturels, des raisons plus structurelles posent question quant à l’avenir de la consommation américaine de vin.

Les surstocks de vin liés au Covid : un frein à la reprise

Les importants stocks accumulés lors de la période post-Covid ont fortement affecté les performances des pays exportant vers les États-Unis en 2023. En effet, à la sortie de la crise sanitaire, les volumes exportés ont bondi sous fond de crainte de pénurie de vin notamment pour la réouverture du circuit on-trade.

En plus du rattrapage de l’année 2020, les principaux importateurs et distributeurs américains ont aspiré d’importants volumes à des prix élevés, alors que le consommateur américain disposait de fonds importants couplé au phénomène de Revenge spending. La sur-accumulation de stocks de vin, non-ajustée à la baisse progressive de la demande, a provoqué d’importants stocks en cascade (retail et wholesale).

Impact de l'inflation sur le consommateur en 2023

La baisse de la consommation de vin se justifie également par l’apparition d’une importante inflation dès 2022, impactant le consommateur doublement. Premièrement, le renchérissement important des matières destinées à la fabrication de vin (énergie, intrants, emballage, verre) a fait grimper en flèche le prix des bouteilles de vin. En témoigne la différence de prix moyen pour les Champagnes, dont les prix ont augmenté de 23% entre 2021 et 2022 et 5% entre 2022 et 2023. Deuxièmement, l’impact sur le pouvoir d’achat des ménages du renchérissement généralisé des prix, et notamment des prix de l’alimentation.

Début 2024 : une reprise modérée du marché du vin ?

Face aux surstocks, les retailers et wholesalers ont procédé à des ajustements notamment à travers de promotions afin de revenir à des niveaux convenables. Bien que les niveaux de stocks aient passé leur pic mi-2023, ils demeurent toutefois encore élevés en ce début d’année, notamment pour les vins tranquilles.

Malgré les bonnes performances récentes des vins « premiums », aussi bien en volume qu’en valeur, l’année 2023 a marqué un coup d’arrêt au niveau de leur croissance. Les projections à 3 ans d’IWSR estiment un marché faiblement dynamique ou stable en matière de chiffre d’affaire. À l’inverse, les vins « Value » devraient continuer de baisser aussi bien en volume qu’en valeur.

Cependant, les importations devraient être plus dynamiques que les ventes de vins locaux. Sur les 4 premiers mois de 2024, un changement de tendance s’opère au niveau des importations. Certains pays fournisseurs comme la France (+7%) reprennent des volumes par rapport à 2023, alors que d’autres comme l’Italie (stable) réduisent leurs pertes ou sont stables. La situation demeure plus contrastée en valeur, avec des replis toujours importants. La situation devrait toutefois se stabiliser voire s’inverser dans les mois qui viennent, grâce à la baisse de l’inflation et du regain de pouvoir d’achat sur le marché américain.

Vieillissement et changement du comportement des consommateurs de vin : le grand défi pour l'industrie

Comme en Europe, le vieillissement de la population reste un défi aux États-Unis. Plus que cela, les différences de consommation de vin entre les tranches d’âge sont un enjeu crucial pour l’industrie du vin.

Le passage d’une consommation courante de vin abordable à une baisse des volumes mais mieux valorisés semble se confirmer à mesure que les millenials pèsent de plus en plus dans la consommation totale.

Pour permettre au vin de prospérer aux États-Unis, il est crucial de reconquérir le marché en étudiant, comprenant et attirant le nouveau consommateur de vin.